Pull my devil trigger | Mars

Tu es un feu. Tu es un incendie. Tu es une flamme. Libre, et bien trop complexe à approcher sans se brûler. En ça, tu es même un feu de forêt. Oh, toi, tu es probablement l’une des personnes les plus brûlantes de cet orphelinat. Un mot de travers, et le volcan entre en éruption. Et de tes lèvres énervées, de ta bouche colérique ne sort pas du venin mais bien de la lave en fusion, prête à cramer n’importe quelle personne sur place.

Parce que colérique, tu l’es. Impulsive, encore plus. Protectrice, parfois même violente. Oh t’aimes pas les gens qui grognent ou qui t’attaquent toi ou ceux que t’aimes. Alors souvent tu t’arranges pour les étaler en deux temps trois mouvements. Parce que Mars. T’es classe. T’es belle. Et surtout, t’es forte. Mais putain, t’es un peu bête sur les bords. Pas spécialement stupide parce que dans le fond t’as l’intelligence nécessaire pour figurer parmi les meilleurs de l’orphelinat – je crois – mais t’es stupide parce que t’es lente à la détente. T’es pas le fruit le plus mur du panier.

Alors toi t’es le feu, les bras. La musculature. Pas le cerveau. Coups de poings enragés dans un sac de frappe ou alors les flammes qui sortent du pot d’échappement, et le bruit sourd de la moto te caractérisent. Parce que t’es bruyante. Tu parles vite, tu hurles et tu t’entends presque pas parler. Et faut même pas essayer d’avoir un débat avec toi, parce que tu t’emballes dès que quelqu’un est pas d’accord avec toi, tu t’enflammes plus vite qu’une allumette et tu hurles, tu t’énerves et tu peux faire preuve de la pire des mauvaises foi. Parce que tu détestes qu’on te dise quoi faire, tu détestes qu’on te dise ce que tu es.

Parce que t’es libre. Aussi libre qu’une moto qui vrombit et ronronne en fonçant entre les voitures. Aussi libre qu’un avion à réaction qui fonce entre les nuages, qui les écarte et qui transforme un ciel sombre en un beau soleil. Ouais, t’es libre. Et ceux qui essaient de te mettre en cage, ils peuvent bien aller se faire foutre. Donc t’es rebelle. Désobéissante. Tu jures à n’en plus finir. Oh, non, t’es pas la fille parfaite, ça c’est sûr. Toi, tu serais pas bonne à marier. Mais comme tu le dis si souvent, comme tu le dis si bien.

« Nique sa mère. »

Au plus loin que tu te souviennes, Mars, t’as vécu ici. Dans les mêmes murs, dans la même chambre, dans le même endroit pourri et qui pue depuis maintenant près de dix sept ans. Oh putain, t’as jamais été la petite fille parfaite, en tous cas. Rien que quand t’étais gamine, on te raconte encore que t’étais pas la plus sage. Loin de là. Jamais tu mangeais tes petits pois ou tes haricots et l’assiette finissait TOUJOURS par terre. Toujours. Ou alors dans la gueule de la personne qui essayait de t’aider à te nourrir. Parce que toujours, la viande ou les pâtes, c’est mieux. Oh non, fuck les légumes, t’aimes clairement pas ça. Et t’as jamais aimé ça.

Et quid des jouets ? Haha, toi, t’as jamais joué avec les poupées qu’on t’offrait. Tu préférais leur arracher la tête et la faire rouler à l’intérieur de la voiture miniature que t’avais piquée à un camarade y a des années. Ou alors tu jouais à escalader le lit, sauter par dessus et t’enfuir en courant dès que tu le pouvais. En bref, t’as toujours été la turbulence incarnée. En bref, t’as jamais été calme. Et c’était encore pire quand t’as appris à marcher. Oh, plus tu gagnais en autonomie, plus tu perdais en respect et en obéissance.

Jouets, motos, voitures, motos. Oh, ce que t’as toujours adoré ça. Sans même te souvenir de la raison, clairement, la mécanique ça a été ton délire. Dès ton plus jeune âge tu montais dans les véhicules miniatures et tu roulais à l’intérieur. Ou alors t’ordonnais à tes camarades de te pousser à l’intérieur, c’est possible aussi. ‘Fin bref, la vie a toujours été tranquille pour toi. Tranquille, à un détail près.

Toi, t’as jamais apprécié l’idée d’être enfermée dans un orphelinat. Ok, vous pouvez vous échapper et faire quelques tours en ville. Mais tu sais toujours que tu dois y retourner. Et ça, t’aimes pas. Bordel non, t’aimes pas ça du tout. Le nombre de coups que ton oreiller s’est pris quand tu t’es faite choper en essayant de faire le mur et de t’échapper pendant les heures pas autorisées. En pleine nuit, quoi. Oh non, Mars, tu kiffes pas la vie ici. Et ça a été un enfer pendant au moins quatorze ans.

Parce que c’est là qu’t’as rencontré Floyd. Ah, Floyd. Ce gars fun. Floyd, le mec qui aurait pu être le mec de tes rêves. À l’époque t’étais dans une période sombre de ta vie. Clairement, ouais. Mais ça ça a commencé avant qu’il arrive.

Quand t’as eu une première relation amoureuse. Ouais, c’est arrivé tôt pour la première fois. T’avais quoi. Douze, treize ans ? Vous savez, c’est à cet âge-là qu’on commence à s’intéresser aux autres amoureusement. Et même plus, si affinités. Et comme t’as jamais été quelqu’un qui fait les choses dans les normes, Mars, bah ouais. Tu t’es fourvoyée et t’es sortie avec un mec pendant quand même deux ou trois ans. Mais y avait quelque chose qui marchait pas, clairement pas.

Sur le coup tu savais pas c’que c’était. Sur le coup, tu savais pas pourquoi. Mais en fait, au bout d’un moment, tu t’en es rendue compte.

Bah tu l’aimais pas ce mec en fait. T’es restée pourquoi ? Parce qu’il t’aidait à t’échapper. Mais au final, ça te plaisait pas spécialement cette relation avec lui. Puis entre temps Floyd est arrivé. Et tout a changé.

Parce que ouais. Tu l’as plaqué ce mec. Tu l’aimais pas ce mec. Et quand tu t’en es rendue compte, bah c’était allé trop loin. Vous aviez déjà passé le pas quoi. Franchi la ligne. Et c’était pas aussi bon que tout ce que t’aurais voulu. Que ce que t’aurais pensé. Mais quand tu l’as dit ça a pas arrêté. Il le voulait, alors t’as accepté. Plusieurs fois. Mais ça t’a fait beaucoup de mal, pauvre gamine.

Alors une fois t’as pété. T’as pété un câble, tu l’as insulté, tu l’as envoyé chier et c’est à cause de lui que t’as commencé à détester petit à petit tous ceux de son… Espèce. Ceux qui étaient comme lui. Les hommes, quoi.

Et à ce moment-là, t’as commencé à un peu plus mal tourner. Tu t’es enfuie plusieurs fois de l’orphelinat, tu passais ton temps à te battre avec ceux qui te regardaient de haut. Ceux que t’aimais pas. Et ton mec, ça s’est encore plus mal passé. Il a pas aimé que tu pètes, t’as pas aimé la tournure que la relation prenait. Et t’as commencé à chevaucher cette bête d’acier pour la première fois. Ce qui te plaisait beaucoup plus que n’importe quelle relation amoureuse, ce sur quoi t’as commencé à tirer un trait.

Et t’as eu ta première moto comme ça. Clairement pas un cadeau de quelqu’un. Au début, tu l’as trouvée dans une décharge pendant une de tes excursions. Mais ton meilleur pote, avec qui tu déconnes beaucoup, avec qui tu fais plein de trucs, Floyd, t’a aidée à la retaper. Et après ça, t’as eu une bécane en bonne et due forme. Et c’est comme ça que t’as pu commencer à faire vrombir le moteur. À rouler. À prendre ton pied bien plus qu’avec n’importe quel homme.

Puis t’es tombée dans un puits sans fond. Toi qui pensais ne pas retomber amoureuse, tu t’étais foutu le doigt dans l’oeil, jusqu’au coude, visiblement. Parce que t’es tombée amoureuse de celle qui encore aujourd’hui fait briller ton regard quand il se pose dessus. Mais pourtant. Pourtant.

Y avait quelque chose de pas normal là dedans.

Pourquoi ?

Parce que c’est une femme.

Et toi aussi.

Vous étiez pas sensées pouvoir si ? C’était pas normal, si ?

Et t’as stressé, des heures, des jours, des mois durant. Parce que t’avais peur de comment les gens pourraient réagir. T’avais peur de comment ça aurait pu se passer.

Mais t’étais conne de stresser.

Parce que ton bon vieux pote Floyd allait jamais te relâcher. Parce qu’il allait jamais t’abandonner. Parce que c’est le meilleur mec que tu connaisses, c’est tout.

Tu lui as fait ton coming-out.

Il t’a fait le sien, et ça t’a surprise.

Mais ça a fait que renforcer les liens que vous avez.

Et c’est comme ça que vous êtes devenus encore plus proches qu’un frère et une sœur.

Au début c’était dur de t’habituer.

Maintenant tu reprends tous les cons qui se trompent. Maintenant tu fais tout pour qu’il se sente bien. Parce qu’il t’a sauvée.

Et entre temps, tout est parti en couilles avec Venus. Celle que t’aimes. Elle s’est mise avec quelqu’un. Ton coeur s’est brisé en mille morceaux. Mais tu le connais, ce trou de balle de Sulfur. Oh ouais, tu le connais. T’as envie de le fumer, chaque fois qu’il pose ses pattes dégueulasses sur ta Venus. Sur ta planète. T’as envie de lui mettre des droites, de le faire tomber au sol et de l’achever en l’étouffant avec un coussin chaque fois qu’il la regarde. Mais tu te calmes, parce que t’as ton meilleur pote avec toi. Il est là pour t’aider.

Et toi, tu libéreras Venus des sales pattes de c’t’enfoiré de Sulfur. Tu l’as juré, faut le savoir. Alors t’utilises tous les moyens que t’as à ta disposition pour briser leur couple. Parce qu’il mérite pas une perfection comme Venus.

Clairement pas.